Gouvernance, où sont les femmes de l’ESS ?

09/12/2019
Actualité
Homme, plus de 55 ans, CSP+ et cumulant plusieurs mandats… le portrait type de l’administrateur de l’ESS pose les enjeux de la parité : rajeunir, diversifier les profils et bien sûr, mieux partager le pouvoir entre toutes et tous… Une étude de l’Observatoire nationale de l’ESS pose les termes pour une mobilisation des acteurs.

L’ESS fait, au moins, aussi bien que le reste des entreprises, mais la parité n’y est pas encore. L’Observatoire national de l’ESS a publié, au terme du Mois de l’ESS, une étude fouillée sur l’égalité femmes, hommes dans les instances de gouvernance des structures de l’ESS. Selon ses chiffres, qui s’appuient sur un sondage en ligne qui a attiré près de 1500 répondants, les entreprises de l’ESS comptent 45 % de femmes dans leurs conseils d’administration, en moyenne. Soit le même chiffre que les comités exécutifs des grandes et moyennes entreprises. Ces dernières sont contraintes par la loi Copé-Zimmermann de 2011 à compter au moins 40 % de femmes et d’hommes dans leur comité exécutif.

Le poids des normes sociales

Les coopératives (toutes familles confondues) sont les moins performantes avec 38 % de femmes dans leur instance de gouvernance, contre 41 % dans les mutuelles et 47 % dans les associations. La diversité des familles coopératives donne d’ailleurs à voir des situations très contrastées, qui font écho à la persistance d’un certain nombre de normes sociales encore bien ancrées : les coopératives dites d’usagers (coopératives de consommateurs, scolaires ou d’habitants) flirtent, voire dépassent le seuil des 50 % d’administratrices, quand les coopératives d’entreprises (commerçants, artisans, maritime, transport, agriculture) ne dépassent pas les 10 %. L’enquête reste malheureusement muette sur le sort des administratrices dans les Scop et les Scic.

Seulement 37 % de présidentes

La part des femmes dans les fonctions de présidente reste le maillon faible de l’ESS. 63 % des présidences sont occupées par des hommes et le fossé se creuse avec la taille de l’entreprise : 48 % de présidentes dans les structures de 4 à 9 salariés, 35 % jusqu’à 49 salariés et 18 % de présidentes au-delà. Ce qui fait dire aux auteurs de l’étude que « les enjeux de pouvoirs se renforcent à mesure que la taille et le budget des structures sont importants. » Le différentiel entre associations et les têtes de réseau confirme l’analyse : quand 39 % des associations ont une femme président, le taux descend à 27 % pour les fédérations.
L’étude approfondit cet aspect en analysant la répartition des rôles au sein des exécutifs, jusqu’à parler de « ségrégation des responsabilités ». L’étude constate que les femmes « sont sur-représentées sur les postes de secrétaires et de secrétaires suppléantes alors qu’elles sont sous-représentées sur le poste de Président.e et de trésorier.ère. On retrouve ici un schéma assez stéréotypé de répartition des rôles entre femmes et hommes : les femmes seraient davantage spécialisées sur les tâches de secrétariat alors que les hommes s’occuperaient des aspects budgétaires, techniques et stratégiques. Cette répartition genrée du pouvoir pose la question du partage effectif du pouvoir entre femmes et hommes. »

Parité n’est pas égalité

Au regard de l’ensemble des résultats présentés par l’Observatoire de l’ESS, les progrès sur la parité sous-tendent un enjeu d’égalité réelle dans l’accès et l’exercice des fonctions exécutives au sein des structures de l’ESS. Près de la moitié des répondantes (44 %) disent en effet rencontrer des freins dans l’exercice de leur mandat. La disponibilité et l’articulation entre vie familiale et engagements sont les premiers freins évoqués. L’ESS, comme le reste des entreprises, ont à s’adapter pour créer les conditions de l’égalité.
Par ailleurs, les comportements sexistes, les cas de harcèlement sexuel n’épargnent pas non plus l’ESS : 44 % des administratrices et 32 % des hommes ont déjà été témoins de sexisme dans l’exercice de leur mandat.

Changer les profils

Les administrateurs dans l’ESS sont aussi plus âgés que les femmes. Les deux tiers ont plus de 55 ans, contre 56 % pour les femmes. Et signe que la féminisation n’agit pas que sur la représentation genrée des structures, celles-ci sont d’origine socio-professionnelles plus diverses (60 % de cadres contre 70 chez les hommes) et, de fait, cumulent moins de mandat.
Les témoignages recueillis durant l’enquête en ligne évoquent des motivation différentes aussi : « On note parmi les motivations affichées par les femmes pour occuper un mandat la question de l’«empowerment» (ou autonomisation, émancipation). Alors que femmes et hommes citent parmi leurs principales motivations la «volonté de se rendre utile», de «défendre une cause» ou de «soutenir une structure», les femmes pointent [plus] du doigt des enjeux plus personnels. Les notions de « défi personnel » ou de « prise de responsabilité » sont plus souvent évoquées par les femmes que les hommes.

Comment agir ?

L’étude dépasse le cadre du constat pour soumettre de nombreuses pistes d’action, dont le recours au DLA, au Guide des bonnes pratiques ou encore le Guide de l’Udes. Car le plus étonnant est que 59 % des conseils d’administration de l’ESS n’ont mené aucune action afin de corriger le manque d’égalité constaté. D’ailleurs, nombreux sont les répondants qui estiment que « les choses se font naturellement ». « On peut donc en déduire un manque de conscientisation et de sensibilisation sur le sujet », conclut l’enquête.

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