[INFOGRAPHIE] Et si nous regardions la France au travers des taux d’emploi ESS par département ? Les plus gros volumes d'emploi de l'ESS se trouvent dans les métropoles, mais les taux d'emploi sont plus élevés dans les territoires les plus exposés aux inégalités sociales.

Comprendre en quoi l'ESS dessine, aujourd'hui, l'activité des territoires passe d'abord par les chiffres de l'emploi. Environ un emploi sur dix relève de l'économie sociale et solidaire. Mais ce taux peut monter beaucoup plus haut. La Lozère, département très majoritairement rural, caracole en tête du classement national avec 26,5 % d'emplois issus de l'ESS. A contrario, les zones sous influence des grandes métropoles, comme l'Île-de-France, affichent des taux d'emploi ESS bien en-dessous de la moyenne nationale. Ce qui ne veut pas dire que l'emploi ESS y est faible en volume, au contraire. Mais il est largement surpassé par la concentration d'emplois hors ESS du fait de la polarisation d'activités industrielles ou de services.

L'exemple le plus flagrant qui se situe au sud de la France métropolitaine, sur une bande qui court de la chaîne pyrénéenne jusqu'à la frontière italienne en remontant par le Massif Central, affiche globalement des taux d'emploi ESS supérieurs à la moyenne avec des taux qui dépassent les 15 % dans les sept départements ruraux, entre le Tarn et la Haute-Loire. Deux zones font exception : la Haute-Garonne dominée par la métropole Toulousaine et les départements du littoral méditerranéen, fortement urbanisés et attractifs économiquement où les taux d'emploi ESS n'atteignent pas les 10 %.

Une économie qui affronte les inégalités

Faut-il en conclure que l'ESS ne parvient à tirer son épingle du jeu que là où les entreprises de capitaux ne vont pas ou plus ? Non, répondent les auteurs de l'Atlas commenté de l'économie sociale et solidaire (éd. Juris Association, coordination Observatoire national de l'ESS) : " [notre] étude met en évidence que l'ESS s’inscrit dans une approche par les inégalités, plutôt qu'une simple approche par la pauvreté monétaire. Ainsi, plus il y a d'inégalités de revenus (rapport interdécile) sur le territoire observé, plus la part des établissements de l'ESS est importante".

Autrement dit l'ESS, dans ses stratégies d'implantation répond d'abord à un objectif de justice sociale. La répartition des associations d'aide à domicile illustre particulièrement bien ce fait. Selon le même Atlas, l'aide à domicile en milieu rural est principalement portée par l'ESS (surtout associative) : "84 % des effectifs ruraux en relèvent contre seulement 68 % à l'échelle de la France entière".

Economie présentielle, économie productive

Reste que le cœur de l'activité de l'ESS dans ces territoires relève d'une économie dite présentielle, c'est-à-dire directement liée à la seule présence d'une population : les services (sociaux et médico-sociaux pour l'ESS), l'enseignement (privé associatif), les commerces (coopératives de commerçants) et les loisirs (périscolaire, tourisme social).

Les activités de production (hormis l'agriculture) ne génèrent que peu d'emploi dans l'ESS dans ces zones alors même que la désindustrialisation a appauvri ces territoires. Le défi de l'ESS est de parvenir à influer sur un développement d'activités endogènes. Cela passe, non pas par la multiplication des implantations de nouvelles activités, mais par la capacité des acteurs de l'ESS à créer de nouveaux récits de développement territorial en mobilisant l'ensemble des acteurs économiques, citoyens et les pouvoirs publics, autour de leurs valeurs de coopération au service de l'intérêt général (voir notre décryptage).